Le mot du père…

Marche au désert

Nous avançons dans cette sainte quarantaine du carême, comme jadis le peuple d’Israël traversait le désert, et comme eux nous n’avons pour seule carte routière que la Parole de Dieu, tous ces textes que la liturgie nous donne à méditer de dimanche en dimanche.

Les Hébreux, esclaves en Égypte, ont mis toute leur confiance en Dieu qui leur a donné Moïse pour les libérer. A sa suite, ils ont traversé la mer Rouge à pied sec, ce qui humainement était une folie, expression de la puissance de Dieu à qui rien n’est impossible. D’abord enthousiastes, ils ont connu l’expérience du désert.

Je ne sais pas si certains parmi vous ont eu la chance d’aller dans le désert. C’est une expérience éblouissante. Dans le désert, il n’y a rien, rien que cette étendue à perte de vue dans toute sa monotonie, une immensité qui nous fait sentir à quel point nous sommes petits ; il n’y a rien que nous…et Dieu si nous lui ouvrons notre cœur. C’est alors que, d’un lieu de solitude, le désert peut se changer en lieu d’un cœur à cœur. On dit souvent qu’il n’y a pas de vie dans le désert, ce qui est faux : il y a au contraire une vie mais qui est en attente ; il suffit que tombe une seule goutte d’eau pour que la végétation apparaisse ! Tout peut alors reprendre vie, et l’on voit devenir féconde une terre que l’on croyait stérile. Et c’est précisément cette expérience que le Seigneur veut faire goûter à son peuple : le conduire par la confiance, le faire entrer dans ce cœur à cœur, lui parler, et sceller avec lui une Alliance. Hélas, après avoir erré dans le désert, ils en sont venus à regretter les oignons d’Egypte et à oublier les entraves qui leur faisaient perdre la dignité de leur liberté.

Ecoute ton Dieu t’appelle

De la même façon, ce temps du carême est un temps où, nous dépouillant de tant de choses qui nous encombrent, nous pouvons nous mettre à l’écoute de Dieu qui veut plus que jamais nous faire grandir dans un cœur à cœur avec lui. Par le partage et la pénitence qui nous décentrent de nous-mêmes, la prière nous recentre sur Dieu qui veut faire alliance et nous guider vers la véritable Terre Promise : sa Présence ! Hélas, il est tellement facile de regretter le passé, de récriminer, de murmurer contre Dieu, contre ses frères, contre les autres, contre le monde qui va trop « comme ci », pas assez « comme ça », ….au point d’en oublier le but et le sens de notre vie qui est la joie du Ciel. Bien sûr, le monde va parfois trop « comme ci », pas assez « comme ça », mais le murmure n’est jamais la solution salutaire. Le murmure n’est ni de la parole ni du silence, et c’est un réel poison pour la vie spirituelle.

Au contraire, au fond de nous, nous le savons bien, le secret de notre repos intérieur est dans la transformation de notre propre cœur. Dieu seul peut nous transformer et nous rendre saints comme il est Saint. Pour cela, il a besoin que nous le lui demandions, que nous passions du temps avec lui, que nous l’aimions, que nous le servions, que nous l’annoncions…En goûtant ce temps fort du carême, le désert de notre vie peut devenir un lieu de fécondité et d’espérance.. « Tout le monde te cherche ».

Le Carême avance et nous pouvons être tentés de nous endormir ou de nous habituer, ou de nous laisser envahir par les soucis, les angoisses et la colère que peut générer l’époque que nous traversons. Ne baissons pas les bras, ne faisons pas taire notre cœur ; la foi, l’espérance et la charité ne se confinent pas ! Par sa grâce, Dieu nous appelle à nous approcher de lui dans la confiance, à croire en sa puissance.

Père Christian